12/03/2008
Ingrid et Florent Guerin
Nous vivons a Shanghaï depuis fin 2002 (plus de 5 ans) ; nous sommes arrivé a deux et repartirons a quatre. Nous sommes parti parce que nous avons chacun déjà vecu a l’étranger (moi au Maroc et ma femme Ingrid en Angleterre et en Italie) et que nous avons adoré cela. Le fait de découvrir une nouvelle culture, une nouvelle manière de travailler et de vivre est une experience des plus enrichissantes. Voila 5 ans que nous vivons a Shanghai et les contrats d’expatriation de Lafarge sont en général de 5 ans maximum ; nous risquons donc de quitter Shanghai en 2008 pour d’autres aventures.
Quelles sont les 5 choses que vous préférez en Chine ?
- les rencontres avec l’ensemble des nationalités,
- le perpetuel mouvement de la ville vers l’amélioration des conditions de vie,
- la securité,
- les magasins, coiffeurs et centres de massage (téerapeutiques) ouverts jusqu'à minuit,
- la facilité de voyager dans d’autres pays d’asie.
Quelles sont les 5 que vous regrettez le plus ?
- l’absence de nature,
- le fait de ne pas pouvoir sortir de la ville (d’un univers urbain) sans devoir prendre l’avion,
- l’absence de livre en français,
- la pollution sonore et aérienne,
- les gros embouteillages de plus en plus fréquents.
Quels conseils pourriez-vous donner au réseau des anciens de Centrale Marseille sur une expérience en Chine et en particulier dans votre ville ?
La Chine n’est pas un pays facile car la societe chinoise est dure, les relations violentes et il faut parler chinois pour la vie quotidienne (c’est un avantage vis-à-vis des anglo-saxons qui en sont tout desarçonnés... un pays ou on ne parle pas anglais !) ; les 6 premiers mois, nous sommes un peu des « bébés » ayant besoin d’une assistance permanente pour toutes nos actions. Les premiers mois sont donc difficiles et il faut être patient ; ça ne peut que s’ameliorer…
Dans les relations en Chine, l’énervement (surtout venant d’un étranger) est une defaite pour celui qui s’énerve ; ca n’est pas facile (pour les bons latins que nous sommes) mais il faut essayer de s’y tenir.
Un dernier conseil ; la vie a Shanghaï peut etre enivrante au debut (beaucoup de mouvements, de nombreuses rencontres, de très nombreuses possibilités de sortie,..) ; il fait savoir raison garder.
Pourriez-vous nous dresser les enjeux de votre business sur votre zone ?
La Chine a besoin de tout et vite. Lorsque vous vivez en Chine ou même visitez le pays, vous comprenez très vite pourquoi la Chine absorbe tant de grues, ciment, pétrole, acier et autres matières premières. En cinq ans j’ai vu des kilomètres de ponts, de tunnels et d’autoroutes se construire, 5 aéroports internationaux sortir du sol… et la construction immobilière est énorme (d’où les problèmes de pollution sonore évoqués plus haut). Il faut donc construire rapidement, car tout change très vite. En matière de sécurite, nous touchons à une notion toujours assez eloignée des standards Chinois, la difficulté venant du fait que si les fournisseurs chinois savent produire ou construire vite, le respect des normes est parfois oublié. Cela peut également impacter directement la qualité des produits. La notion de finition est absente ; « ca marche donc c’est bien » ; pas besoin d’être beau.
Ce point est d’autant plus vrai lorsque l’on produit en Chine pour vendre en Chine (ce qui est le cas de Lafarge) : il faut construire à bas coût si l’on veut espérer obtenir un retour sur investissement raisonnable.
Pouvez-vous nous dresser un rapide panorana de votre marché, de la concurrence en Chine ?
Le paramètre essentiel est que le marché chinois est dirigé par le prix. La copie est reine, le contrat n’est pas parole d’évangile, la parole non plus ; tout est question de pression ; un peu le jeu du chat et de la sourie où il faut rester le chat.
La Chine est un pays qui évolue a une vitesse folle et tout change en permanence. Une chose n’est vraie que dans un certain contexte et à un certain moment. Les relations commerciales sont donc très dures, basées sur le Guanxi (notion de réseaux essentiels surtout pour les negociations avec les autorités locales), les coûts, et demande une lutte permanente par laquelle il faut toujours savoir conserver des moyens de pression autres que purement contractuels ; le partenariat a long terme n’existe pas ; le profit ne vaut que lorsque l’on peut l’obtenir tout de suite. C’est le tribu à payer dans une société qui change si vite.
Le marche des materiaux de construction est gégantesque, en très forte croissance mais la concurrence est très sévère et les privés chinois qui se sont enrichis d’une manière ou d’une autre n’hésitent pas a se lancer sur un marche qu’ils connaissent peu s’il espèrent en tirer profit rapidement au mépris des règles d’investissement occidentales. Les constructeurs automobiles en savent quelque chose. De plus, un certain protectionnisme existe avec la présence d’un puissant et soutenu réseau d’entreprises publiques dans tous les domaines.
Comment imaginez-vous l'évolution de votre secteur d'activité sur la zone dans les 5 ans ?
Compte tenu de la croissance actuelle, des besoins en habitat, en amélioration de l’habitat, des projets d’infrastructure en cours, le marché a toute les chances d’évoluer très favorablement. Mais la Chine doit passer le cap des jeux de 2008 et de l‘exposition universelle de 2010 et accélérer la croissance de son marché intérieur en créant une véritable « classe moyenne » proportionnée a sa population totale… l’enjeu social est colossal a l’échelle de la Chine.
Avez-vous eu vent des investissements chinois en Méditerranée ?
Les Chinois qui se sont enrichis rêvent de plus en plus d’investissements immobiliers en France mais pas d’investissements industriels a ma connaissance. Marseille pour eux n’existe que par le football alors que par exemple Lyon et la région Rhone-Alpes sont très actives en Chine ayant créé une efficace agence d’aide a l’investissement en Chine pour les entreprises francaises et en Rhone-Alpes pour les investisseurs Chinois. Marseille et les régions du sud devraient s’en inspirer !
Que vous a apporté votre formation pour le poste que vous occupez actuellement ?
L’étude de l’anglais (je travaille uniquement en Anglais dans ce partenariat entre Lafarge Gyspe et l’Australien Boral), la communication.
Que faudrait-il adapter à la formation Centrale Marseille pour encore mieux répondre aux enjeux qui sont les votres ?
Je pense que les techniques de négociation et le management de projet (et ses techniques) devraient être plus présents.
Pouvez-vous nous raconter une anecdote personnelle que vous avez vécue en Chine ?
Les Chinois ont une notion altérée de la propriete privée et lors de notre emménagement dans notre première maison, ma femme a été très surprise de découvrir parmi les demenageurs l’ensemble de nos voisins venant observer notre interieur, nos meubles et objets ! L’étranger (lao wai en Mandarin), malgré la presence de milliers d’entre eux a Shanghaï, reste un objet de curiosité.
Comptez-vous assister aux JO ? En entendez-vous parler ?
Je ne pourrai pas y assister car je dirige un projet de construction d’une usine a Chengdu et celle-ci doit demarrer en Mai/Juin. Bien sûr la Chine ne parle que de ça !
20:20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chine, economie, centrale, pekin, marseille, guerin